Coordination des responsables des instances du CoNRS (C3N)

Objet : Opposition de la C3N à la proposition des CNRS key-labs

Dans le projet de contrat d’objectifs, de moyens et de performance du CNRS pour la période 2024-2028, il est annoncé que « le CNRS se propose de mettre en valeur, parmi les laboratoires dont il assure la tutelle, les plus remarquables d’entre eux, ceux qui sont réellement “de rang mondial” », dans lesquels « naturellement, l’implication du CNRS serait plus forte, et plus pérenne ». Cette proposition a été présentée par le Président Directeur général du CNRS, Antoine Petit, lors de la Convention CNRS des directeurs et directrices des laboratoires qui a eu lieu le 12 décembre 2024 : il s’agirait de concentrer plus de ressources humaines sur environ un quart des unités de recherche, les « CNRS key-labs ».

La C3N, instance de coordination entre le conseil scientifique du CNRS, les conseils scientifiques d’instituts, les sections et les CID reconnaît l’importance de positionner au niveau national et international les activités scientifiques des unités. Cependant la C3N s’oppose à la proposition des CNRS Key labs, déplore les conditions d’élaboration de cette proposition et s’inquiète vivement des conséquences scientifiques, organisationnelles et humaines qu’entrainerait sa mise en œuvre.

Sur la méthode, la C3N rappelle que l’évaluation par les pairs, collégiale et fondée sur des critères transparents est un élément fondamental du fonctionnement des institutions académiques. Or la proposition de « CNRS key-labs » et le choix des laboratoires distingués ont été réalisés par la direction du CNRS et de ses instituts sur la base de critères non concertés et non rendus publics, sans consultation des instances qui accomplissent cette mission d’évaluation pour le compte du CNRS. Non seulement cette consultation est prévue par la réglementation mais de plus elle ne peut être que bénéfique par les éclairages qu’elle est susceptible d’apporter à la direction du CNRS. En outre, la mise en oeuvre de cette proposition échafaudée de manière unilatérale affaiblit nécessairement les interactions avec les institutions partenaires du pilotage des UMR.

Sur le fond, cette proposition aboutirait à ce que les moyens humains (personnels ingénieurs, techniciens et chercheurs) soient concentrés sur un nombre réduit de laboratoires élus, au détriment des autres. Cela risquerait d’entraîner un tarissement des recrutements et une augmentation des mobilités vers des laboratoires que le label « CNRS key-labs » aurait rendus plus attractifs. Cela pourrait initier un effet boule de neige sur le soutien des autres tutelles conduisant des laboratoires n’ayant pas cette étiquette à péricliter. Incidemment, cette politique repose sur une logique éminemment discutable de discrimination,
entre laboratoires et entre sites, dans les conditions de travail offertes par le CNRS à ses personnels. La C3N s’alarme donc de la concentration annoncée des moyens du CNRS sur un nombre réduit de laboratoires, qui ne peut que conduire à l’affaiblissement du CNRS, à la réduction de son ancrage territorial, au déclin du sentiment d’appartenance et au clivage de sa communauté.

La C3N refuse une politique qui consisterait, pour le CNRS, à laisser les trois quarts de ses laboratoires au bord du chemin et qui, en réponse à une situation de pénurie budgétaire, ne proposerait qu’une différentiation inutile et néfaste aboutissant nécessairement à désorganiser, affaiblir et atrophier le CNRS et dont les risques en cascade semblent avoir été largement sous-estimés.

Christine ASSAIANTE
Porte-parole de la C3N

Motion adoptée le 16 janvier 2025, à l’unanimité des voix exprimées
25 Votants : 24 pour, 0 contre, 1 abstention

Destinataires :
Madame Élisabeth BORNE, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche
Monsieur Philippe BAPTISTE, ministre chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche
Monsieur Antoine PETIT, président-directeur-général du CNRS
Monsieur Alain SCHUHL, directeur général délégué à la science du CNRS
Mesdames les directrices et Messieurs les directeurs d’Instituts du CNRS
Madame Virginie DUPONT et Monsieur Dean LEWIS, vice-présidente et vice-président de France Universités
Monsieur Philippe MAUGUIN, président-directeur-général de l’INRAE
Monsieur Bruno SPORTISSE, président-directeur-général d’Inria
Monsieur Didier SAMUEL, président-directeur-général de l’Inserm
Madame Valérie VERDIER, présidente-directrice-générale de l’IRD
Madame Anne-Isabelle ETIENVRE, directrice de la recherche fondamentale du CEA
Madame Anne JOULAIN, présidente de la Commission permanente du Conseil national des universités
Monsieur Emmanuel DUFLOS, président de la Conférence des directeurs des écoles françaises d’ingénieurs
Mesdames les présidentes et Messieurs les présidents des Sections et des CID du Comité national de la recherche scientifique
Assemblée des directions des laboratoires (ADL)